samedi 11 août 2012

FILIPE CASACA / A minha casa é onde estàs



Ma maison est là où tu es...

Sous ce titre en forme de déclaration amoureuse, le jeune photographe lisboète Filipe Casaca  présente une brève série de clichés procédant du désir de révéler une "intimité", la sienne et celle de sa femme, Teresa. C'est d'ailleurs  à elle qu' il offre ce livre, auto- édité à trois cents exemplaires, tout autant livre de photographies que recueil de poèmes.

"a broad portrait with a domestic atmosphere about my wife, and our private life in a place shared between the two of us."

Au milieu des centaines de livres de photographie mis à disposition en Arles, celui-ci se détachait par sa sobriété - couverture toilée noire, petit nombre de pages- et sa "rudesse". Un livre secret d'une certaine façon, où un homme capture quelques images ( pas plus de quinze, chacune isolée sur le blanc de la page, et d'un format assez petit, assez ramassé) de sa compagne, à la dérobée peut-être et parfois aussi en lui faisant prendre la pose...pendant une étreinte ou avant / après l'amour.



Déjouant me semble-t-il les pièges de l'iconographie habituelle de la muse ou du modèle ( Je nuance: il y a un effet de rappel des clichés de O'Keefe par Stieglitz, ce qui n'est pas peu, ou du modèle au miroir de Bonnard ...) en cela que la construction de la photographie en image à scruter doit ici autant au corps du sujet qu'à la qualité du regard porté sur celui-ci et à ce qui se devine de jeu à deux, de connivence et de confiance.

Saturé, fort,le noir et blanc réduit radicalement l'espace à la seule chambre, la "camera", et enserre le corps morcelé, érotique de l'amante, nous obligeant à nous tenir au plus près, pour mieux révéler sa sensualité et sa puissance iconique.

Elle absente, lui photographie leur lit défait, un sèche-cheveux jeté en travers des draps, une paire d'escarpins - enregistrant par défaut, un temps trop tard, les gestes du quotidien, la toilette, la séduction. Art résiduel, défectif par excellence, la photographie se prête à ce jeu toujours troublant et ici particulièrement touchant.

 
Pour autant, lorsque son visage est à l'image, jamais Teresa ne retourne son regard à l'objectif; elle ne paraît pas non plus  surprise dans l'esquisse d'un mouvement. Aucune irruption  d'un désir étranger à ce pas de deux. Superbe, la belle porte son regard ailleurs, comme clos sur une intériorité qui se déroberait tout de même , sur une rêverie tenue secrète, à tout le moins pour nous.



Filipe Casaca, A minha casa e onde estas, Lisboa, 2011.




















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