samedi 29 septembre 2012

DAVID GOODIS / Obsession


" It began with a shattered dream."


Pour d'aucuns "Obsession" est une fragrance voluptueuse créée dans les années quatre-vingt, pour d'autres, un film baroque de Brian de Palma...
Pour NOUS, définitivement, "Obsession"  est un roman biscornu et vertigineux, datant de 1952, assiégé par "ce sens de l'inévitable catastrophe intérieure" qui caractérise son auteur, David Goodis.
 Certes, la descente aux enfers du personnage, dans une ville retournée par la neige et le vent, dès lors qu'il ne parvient plus à faire obstacle aux élans d'une mémoire enfouie, aboutit à une délivrance et à un retour à l'ordre plutôt classiques. Mais les détours qu'emprunte Alvin Darby, courtier en assurances perturbé par l'irruption d'obsessions incessantes, quasi psychédéliques, sont de ceux qu'on n'oublie pas. Délire, angoisse de la dissolution, solitude, exaspérés par la nuit et le froid qui s'abattent autour de lui, brouillent les repères, noient ce qui de sa vie semblait fermement installé dans une tourmente, un enchevêtrement de mirages, de voix lancinantes et d'illuminations.
Pour aller vite, une chevelure blond platine obsède un homme. Un temps il croit lire dans cette réminiscence floue un appel à retourner vers une "vieille" maîtresse, cocaïnomane sadique, variation autour du phénomène de la mante religieuse (  Goodis s'inspirerait régulièrement , d'après son biographe P.Garnier de ce qu'il aurait enduré avec sa propre épouse pour composer ces scènes de torture psychique!). En face, la femme du héros, dont il fantasme soudainement l'infidélité , comme happé par un dérèglement incontournable, avec un qu'il se met en tête d'occire.
Entre la brune et les blondes de ce récit cauchemardesque, c'est alors un duel à mort, dont Alvin  réchappe de justesse, sauvé in extremis par un fond de conscience, à moins que ce ne soit le travail qu'il mène bien malgré lui vers la vérité de ses visions.
C'est en payant le prix fort d'un masochisme total ( lire la scène hallucinante où Géraldine lui offre sa première prise de coke) que notre homme parvient à lever le verrou et à laisser remonter à la surface une "sale histoire" d'amour incestueux avec sa soeur aînée...
Pour cela, il lui aura fallu aller jusqu'au bout du territoire infernal de sa mémoire trouée, perdre pied, devenir tour à tour nomade, marginal,criminel, et s'infliger une interminable nuit de défonce, violente et glauque.

"Tu veux que ça fasse mal, c'est ça, hein?"
  
Obsession, David Goodis, Rivages , 1989, Paris.

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